C'est ainsi que, après une courte introduction et un rappel portant sur les soubassements théoriques et méthodologiques en la matière, ce guide propose une démarche pratique de gestion de la remédiation (une parmi d'autres, certes) selon un processus de "diagnostic- remédiation". Des exemples concrets soutiennent les développements proposés.
Nous attirons, dès le départ, l'attention de nos collègues enseignants sur le risque de vouloir faire de ces exemples « des modèles à suivre à la lettre» et à mettre en œuvre, tels quels, dans leurs classes. L'enseignant ne devra (ne pourra) en aucun cas se rabattre simplement sur (et se suffire de) ces exemples. Il est indispensable qu'il prenne en compte les besoins de la discipline ainsi que la spécificité de sa classe.
Préciser que, pour le moment, le guide porte surtout sur les disciplines outils (langues et maths), ce qui n'exclut pas de traiter les autres disciplines.
2. Le cadre conceptuel et méthodologique
Il nous semble utile, ici, de répondre à certaines questions afin de bien clarifier les concepts, notions et expressions qui doivent éclairer et faciliter l'usage du présent document.
2.1. Qu'entend-on par remédiation?
Remédier, c'est - après une évaluation formative (au moment de l'installation des ressources ou lors des semaines d'intégration) - apporter les ressources insuffisamment
maîtrisées aux élèves en difficulté et leur apprendre à mieux les mobiliser. La remédiation porte, exclusivement, sur les critères minimaux non maitrisés. Elle s'appuie sur un diagnostic des erreurs des élèves.
2.2. Comment réaliser un diagnostic?
Toute activité de remédiation se base sur un diagnostic. Celui-ci peut être : sommaire ou fin'
■ Diagnostic sommaire Il s'agit de définir, pour chaque critère, de manière générale et globale, s'il est atteint ou pas. Par exemple:
1. Pour une production en langue:
• Pertinence: La production répond-elle à la situation d'intégration proposée ?
• Utilisation correcte des outils de la discipline: Le texte de la production est-il
intelligible?
• Cohérence : Le texte de la production est-il articulé et présente-t-il un enchaînement
logique et une progression correcte ?
2. En mathématiques:
• Pertinence: La démarche suivie permet-elle de résoudre la situation d'intégration
proposée ?
• Utilisation correcte des outils de la discipline: Les outils sont-ils, globalement, bien
utilisés?
• Cohérence : La production présente-t-elle des contradictions ? Les résultats trouvés
sont-ils vraisemblables?
Ce type de diagnostic est censé alimenter deux types de remédiation selon le degré de profondeur qui sera donné à l'instrumentation:
- une remédiation intégrée au processus enseignement/apprentissage, pour un dispositif rapide, ou
- une remédiation institutionnelle si le dispositif mis en place est plus instrumenté.
La remédiation intégrée au processus d'enseignement - apprentissage est une conception de la remédiation selon laquelle cette dernière, même si elle n'est pas très approfondie, doit être fréquente, et doit répondre aux besoins du groupe-classe dans la suite des apprentissages ; l'important est d'acquérir un caractère réaliste, et d'être un support permanent aux apprentissages.
La remédiation institutionnelle est vue comme un processus systématique qui fait l'objet d'une inscription dans les emplois du temps. Elle se distingue de la remédiation intégrée par le fait qu'elle fait l'objet d'une forte instrumentation : informatique, fichiers auto-correctifs, recours systématiques à des techniques comme le tutorat, ou encore le travail par contrat,
etc. La remédiation n'est plus vue comme un dispositif occasionnel, destiné à répondre à des besoins individuels, mais comme un dispositif organisé et régulier.
■ Diagnostic fin
Le diagnostic fin nécessite, quant à lui, de la part de l'enseignant, un travail d'investigation plus précis, afin de préciser, au mieux, les origines des erreurs. Comme par exemple à la suite d'une analyse des difficultés des élèves pendant un module l'intégration.
C'est là qu'on devra s'atteler à mettre en œuvre les différentes étapes d'un bon diagnostic ci- dessous mentionnées. Ce diagnostic devra alimenter :
- une remédiation ciblée afin de donner plus de chances à certains élèves (en particulier pour des élèves moins avancés) de dépasser leurs difficultés, ou
- une remédiation spécialisée, si les conditions le permettent.
Dans la logique de la remédiation ciblée, celle-ci est menée par l'enseignant dans sa classe comme une composante prioritaire des apprentissages, en réponse à des besoins précis qui apparaissent dans le cadre des apprentissages. La remédiation est vue comme une nécessité, en réponse à une volonté de différenciation très forte du processus d'enseignement-apprentissage, et sur la base d'un diagnostic précis, comme, par exemple, dans les semaines d'intégration.
Pour la remédiation spécialisée, on fait appel à des spécialistes (psychologues, logopèdes (orthophonistes), thérapeutes ...). On est davantage dans le domaine de l'orthopédagogie. C'est, peut-être pour le moment trop demander dans les conditions actuelles de la plupart de nos écoles.
2.3. A quelles erreurs remédier?
Rappelons qu'en cours d'apprentissage l'erreur n'est pas considérée comme une faute mais comme un point d'appui pour faire progresser les élèves. Cependant, il est illusoire de vouloir remédier à toutes les erreurs et en même temps. Il ne faut pas que la remédiation se fasse aux dépens de l'installation des ressources.
Pour orienter convenablement la remédiation, il faut prendre en compte la fréquence et l'importance de l'erreur. Il n'est pas nécessaire d'agir tout le temps, ni trop vite en cas de difficulté de l'élève. N'oublions pas que tout apprentissage demande du temps, et que l'erreur en fait partie intégrante. Il ne s'agira de penser remédiation que quand cette erreur s'installe dans le temps. Certaines erreurs sont liées à des facteurs de contexte : une consigne ambiguë, un dessin peu clair, un malentendu dans le type de tâche demandée, etc. Les causes sont clairement identifiables, et demandent un simple ajustement, pas une remédiation.
Le tableau suivant permet de repérer les types de remédiations appropriés, en fonction des types d'erreurs, et de leurs sources .
Types et sources d'erreurs Types de remédiations
Erreurs ponctuelles Occasionnelles (dues à des facteurs de contexte) Pas de remédiation dans l'immédiat
Ayant un impact sur la poursuite des apprentissages Remédiation intégrée
Erreurs récurrentes Remontant loin Sans conséquence grave Remédiation nécessaire à terme (remédiation institutionnalisée)
Aux conséquences importantes Remédiation en profondeur (remédiation spécialisée)
Récentes Risquant de s'estomper lors des apprentissages à venir Pas de remédiation dans l'immédiat
Devant être remédiées immédiatement Remédiation ciblée
2.4. Quelles formes doit prendre la remédiation?
La remédiation peut prendre différentes formes selon le degré de profondeur que l'on donne au diagnostic et à la mise en place d'un dispositif de remédiation. Tenant compte de l'impact sur les progrès enregistrés par les élèves, nous privilégions de manière générale les deux types de remédiation suivantes.
2.4.1. La remédiation intégrée, ou la remédiation vue de manière opérationnelle
La remédiation intégrée est basée avant tout sur le réalisme, dans des classes caractérisées par des conditions difficiles. C'est pourquoi nous nous focaliserons, dans un premier temps, sur deux niveaux qui nous semblent concilier l'impact et l'opérationnalité.
Mieux vaut ne viser que ces deux niveaux et pratiquer effectivement des remédiations, même si elles sont relativement élémentaires, que de rester aux intentions !
Niveau 1 : remédiation de type feed-back
Ce premier niveau de remédiation consiste à procurer aux apprenants la réponse ou la production attendue : la bonne correction s'il s'agit d'une production fermée (ex. maths, sciences...), ou des éléments significatifs de production attendue, s'il s'agit d'une production ouverte (ex. langues, sciences sociales.). Ce feed-back peut prendre plusieurs formes, dont:
1.1. Feed-back 1 : remédiation lors de la production. Exemple : l'enseignant, portant un regard sommaire sur les copies des élèves en production, relève des erreurs d'ordre périphérique (ponctuation, pluriel des noms,.). Il leur demande de revenir sur leurs produits avant la remise des copies en vue d'apporter des corrections.
• Modalités de gestion possibles :
o Elève(s) + production(s) + consigne (ex. nettoyez vos textes, mettez des majuscules au début de chaque phrase, apportez la ponctuation qui convient,.); o élève + production + enseignant ; o élève + production + tuteur.
1.2. Feed-back 2 : remédiation intégrée aux activités de la vérification. Les élèves, seuls ou avec l'accompagnement de l'enseignant, et en fonction des résultats de la vérification, apportent les corrections qui conviennent. L'enseignant, portant un regard sommaire sur les résultats de la vérification effectués par ses élèves, peut leur proposer des activités qu'il improvise ou qu'il prend dans la banque des exercices ou, éventuellement, dans le manuel scolaire. Les élèves seuls ou avec l'aide de l'enseignant ou un tuteur améliorent la qualité de leur production.
• Modalités de gestion possibles :
o élève + production + fiche de vérification+ exercices ; o élève + production + fiche de vérification + exercices + enseignant ; o élève + production + fiche de vérification + exercices + tuteur.
1.3. Feed-back 3 : remédiation individualisée à la remise des copies avec un corrigé possible. Exemple : l'enseignant, pour des productions fermées en mathématiques notamment, propose à quelques-uns de ses élèves un corrigé possible. Ceux-ci, seuls ou avec l'aide de l'enseignant ou du tuteur, font la comparaison entre leurs propres produits et le corrigé proposé et apportent la régulation ou l'ajustement qui convient
• Modalités de gestion possibles :
o élève + corrigé possible ; o élève + corrigé possible + enseignant ; o élève + corrigé possible + tuteur.
1.4. Feed-back4 : remédiation individualisée à la remise des copies corrigées. L'enseignant veille à mentionner les erreurs en vue d'aider l'élève à identifier celles-ci et la manière de les corriger.
• Modalités de gestion possibles :
o élève + copie corrigée ; o élève + copie corrigée + enseignant ; o élève + copie corrigée + tuteur.
Document de travail - Proposition du guide de la remédiation pour le niveau primaire Niveau 2 : remédiation au niveau de l'ensemble du groupe d'apprenants
Ce deuxième niveau consiste à repérer, tous critères confondus, les deux ou trois erreurs les plus fréquentes relevées auprès d'une proportion significative du groupe des apprenants (plus de 50% des élèves par exemple) et proposer une batterie d'exercices et de situations traitant des ressources, voire, en cas de besoin, proposer de nouvelles stratégies de réapprentissage.
• Modalités de gestion possibles :
o groupe classe +exercices+enseignant.
o groupe classe +nouvelle présentation des notions+enseignant. o groupe d'élèves + exercices + enseignant. o groupe d'élèves + nouvelle présentation des notions + enseignant.
2.4.2. La remédiation ciblée, ou la remédiation vue de manière professionnelle
Dans la pédagogie de l'intégration, la remédiation ciblée est considérée avant tout comme une réponse aux besoins identifiés lors des apprentissages de ressources, mais aussi et surtout lors des modules d'intégration. Sa qualité est liée avant tout à la qualité du diagnostic qui est posé.
Poser un diagnostic fin : une démarche en quatre étapes
Les démarches de remédiation ciblées se basent sur la notion d'"erreur", que l'on exploite en vue d'une remédiation. Une activité de remédiation ciblée n'a du sens que si elle est précédée d'un bon diagnostic. De même qu'il n'aurait pas de sens pour un médecin de prescrire un remède avant d'avoir posé un diagnostic.
Nous parlerons alors de démarche de "diagnostic-remédiation".
On peut dire qu'un diagnostic des difficultés comprend quatre étapes principales.
1. Le repérage des erreurs
2. La description des erreurs
3. La recherche des sources des erreurs
4. La recherche des causes des difficultés de l'élève
Comment élaborer un dispositif de remédiation ciblée ?
Face à des difficultés d'apprentissage graves, l'enseignant élabore des dispositifs de remédiation ciblée. En voici quelques-uns, à titre indicatif :
1.1. Groupes de besoin : remédiation ciblée. L'enseignant, au terme d'une évaluation formative et après avoir fait un diagnostic fin des erreurs (lors de la période prévue pour la remédiation au terme de la première semaine d'intégration, par exemple), répartit ses élèves en groupes de besoin selon les critères non maîtrisés ou selon les types d'erreurs. Il prépare, au préalable, des piles d'activités. En classe, il spécifie à chaque groupe d'élèves la pile qui le concerne et les invite à les traiter successivement. S'il a préparé aussi des fiches de correction, il n'aura qu'à les orienter vers lesdites fiches. Sinon, il procédera à la correction, lui-même ou en se faisant aider par un tuteur.
• Modalités de gestion possibles :
o Groupe d'élèves + enseignant ou tuteur + fiche d'activités. o Groupe d'élèves + enseignant ou tuteur + fiche d'activités + fiche corrective.
1.2. Un élève ou deux élèves : remédiation ciblée individualisée. L'enseignant, s'aidant d'un tuteur dans une classe normale ou à niveaux multiples et face à une difficulté ne pouvant être traitée que sur le plan individuel (un retard d'apprentissage pour absence de maladie par exemple), peut recourir à cette modalité de gestion de la remédiation et à l'aide d'outils de remédiation appropriés (manuels scolaires, fiche corrective individuelle, ...).
• Modalités de gestion possibles :
o un élève seul + enseignant + fiche corrective individuelle. o deux élèves + enseignant + fiche corrective individuelle.
2.5. Quels outils pour la remédiation?
Les outils de remédiation doivent être de deux ordres :
- des outils de remédiation des ressources ;
- des outils de remédiation de l'intégration ;
Ces derniers outils doivent s'inspirer avant tout des critères, et principalement des critères autres que le critère « utilisation correcte des outils de la discipline ». Il faudra dès lors orienter ces outils de remédiation sur :
(1) le critère de pertinence : décoder une consigne, un énoncé de problème, identifier les données utiles, parasites, identifier quelle opération on va devoir mobiliser pour résoudre la situation-problème...
(2) le critère de cohérence : en langue, comment articuler deux phrases, deux paragraphes, comment construire le discours, etc. ; en mathématiques, comment amener l'élève à estimer la réponse, à déterminer l'ordre de grandeur, etc.
Quant aux outils de remédiation des ressources, il convient de se rapporter aux développements ci-dessus (point 2.4).
3. La gestion de la remédiation
Démarche de remédiation
Dans le cadre de la Pédagogie de l'Intégration la remédiation est considérée comme un processus qui s'inscrit dans la durée. Il ne faut pas attendre de se rendre chez-soi avec les productions des élèves pour réfléchir sur la remédiation. Au contraire, il faut être vigilant et mettre à profit les moments de production et de vérification.
La démarche que nous proposons s'articule autour de trois moments:
1. Le diagnostic des erreurs,
2. La priorisation des erreurs,
3. Le choix des outils de remédiation.
1. Le diagnostic des erreurs:
Comme vu plus haut, ce diagnostic peut-être:
• Sommaire: dans le cadre d'une remédiation intégrée, ou
• Fin dans une remédiation ciblée.
Le diagnostic sommaire repose sur le repérage des erreurs (en réponse, par exemple aux questions concernant les critères : La production répond-elle à la situation d'intégration proposée ? Le texte de la production est-il articulé et présente-t-il un enchaînement et une progression ?
Il faut le mettre en œuvre dès la phase de production. L'enseignant, en se référent aux productions des élèves, peut intervenir (en attirant l'attention des élèves par exemple), pour remédier à certaines erreurs (ponctuation, pluriel, forme de la production, compréhension des consignes, vérification des calculs, .).
2. La priorisation des erreurs:
Il s'agit de classer les erreurs identifiées dans les productions des élèves en trois catégories :
- erreurs qui ne nécessitent pas de remédiation immédiate (erreurs liées au contexte, s'estompant avec les apprentissages ultérieurs, ...),
- erreurs qui nécessitent une remédiation rapide et intégrée,
- erreurs qui sollicitent une remédiation ciblée.
3. Les outils de remédiation
Document de travail - Proposition du guide de la remédiation pour le niveau primaire Les outils de remédiation doivent être de deux ordres :
- des outils de remédiation des ressources ;
- des outils de remédiation de l'intégration ;
Partant d'exemples précis, nous proposons, ci-après, des dispositifs relatifs aux différentes discipline